Bababaou !! Réveil en fanfare ce matin ! J'ai pas mis le réveil hier soir, me pensant que mes voisins Espagnols me réveilleraient de leurs indélicatesses bruyantes, matinales et habituelles. Mais fait exprès ce matin, ils se sont abstenus... ou alors je suis seule dans le bâtiment ! Je saute dans les pantaluches, les yeux tout bordés d'anchois, la tête dans le guidon, il me faut le café sinon je suis pas prête de me réveiller ! Mémère commence à fatiguer ! A se coucher à pas d'heure comme les Espagnols et à se lever aux aurores comme je le fais, la corde commence à tirer...

Mais, contrairement à Malagà... je n'ai pas trouvé ici, le petit déjeuner à pas cher ! Il y a bien des offres pour 3€ mais ce sont des déjeuners espagnols avec café, jus d'orange et assiette salée ! Moi, le salé le matin... j'arrive pas ! Donc, en règle générale, je m'achète le croissant à la panaderia du coin à 0,50c et je commande le breakfast Espagnol laissant les tomates et les olives sur le bord de l'assiette. Mais ce matin, je sais pas si c'est à cause du samedi ou alors de la fête de Cruz de Mayo mais toutes les panaderias sont fermées ! Pas le choix, si je veux bien commencer la journée... j'opte pour le breakfast continental à 6€ ! C'est fort de café quand je pense que je mange midi et soir pour la moitié de ce prix là ! Mais bon... y'a des jours où ça le fait pas et 'faut faire avec ! En plus, le jus d'orange ici... c'est une merveille !!! Presque aussi bon que sur la place Jemaa El Fna de Marrakech...

Le soleil aujourd'hui tape plus fort que d'habitude... Je sens qu'on va passer la barre des 35°C sous un ciel blanquinasse que la peau va certainement bien chauffer ! Rassasiée, réveillée, je file vers la cathédrale, en passant par le souk artisanal, juste derrière la place Bib-Rambla. Même s'il n'est pas d'époque, il est fort sympathique et on y trouve de très beaux articles de cuir. J'adore cette odeur.

Plus besoin de plan pour me repérer, je file comme l'éclair par les rues sinueuses que j'ai à présent dans la tête. La foule est plus nombreuse que d'habitude, tous les gens de Grenade sont dehors aujourd'hui. Au coeur du souk, je trouve une croix rouge qui n'était pas là hier. Je ne comprends pas bien les objets déposés au sol... c'est un bric à brac de choses et d'autres sans lien les unes avec les autres mais toujours bien mises en scène autour de la Croix ou Cruz de Mayo.

Je passe devant mon collègue El Toro qui tous les matins me suit du regard...

... et j'arrive enfin devant le Capilla Real (la chapelle royale), que je n'ai pas encore eu le temps de visiter. Il est normal que je vienne présenter mes respects à la Reine Isabelle et à son époux Ferdinand car c'est ici que reposent en paix, ces deux illustres personnages. Malheureusement pour vous, interdiction d'y prendre de photos !

On se demande bien pourquoi... peut-être à cause de la fameuse couronne d'argent d'Isabelle... parce que la franche vérité, y'a pas grand chose à voir, si ce n'est deux gisants, le premier celui du couple de la Reconquista, l'autre de celui du Rey Carlos et de son épouse dont je me souviens plus le nom. Les gisants sont monumentaux comme les églises ici et dans la crypte, on peut voir les quatre petits cercueils de cuir... Pas de quoi avoir de grandes émotions. Mes respects présentés, je file, vers mon arrêt de bus, juste à côté des tombeaux royaux derrière les grilles de la cathédrale car ce coup-ci, on ne m'y prendra plus, je ne grimpe plus dans cette ville qui ne fait que monter et descendre ! Na ! 

La ligne qui monte à l'Albacin et au Sacromonte est la ligne C2, bus rouge. On les trouve partout dans la ville, ils passent très fréquemment et voici les arrêts où on peut les prendre. 

Pour moi, pas de souci à avoir, je descends au terminus du Sacromonte, à l'Abbaye au bout de la route ! Je sais, je sais, je visite beaucoup d'églises et d'abbayes mais d'un autre côté on peut pas trop faire autrement, nous sommes en pays très Catholique ! Mais, je vais vous dire la vérité, je veux visiter celle-ci parce qu'elle a attiré ma curiosité, plus que les autres. On dit que sa porte est surmontée d'une Etoile de David... Un signe juif dans une abbaye, étrange, non !? Je n'ai pas trouvé d'explications sur le net, j'espère en trouver une là-haut ! 

Trente minutes de montée, façon slalom entre les voitures qui montent et qui descendent et je me retrouve toute seule à descendre au terminus ! Grand moment de solitude, car on est ici, au bout du monde, tout au bout de la Vallée du Duro ! La vue est magnifique et je me régale à revoir mes montagnes enneigées.

Mais je me suis régalée de trop ! Il est 13h10... et je viens de rater la visite de 13h et la prochaine n'est qu'à 16h ! Y'a des journées qui commencent mal et qui continuent sur leur lancée ! J'ai beau expliqué à la petite dame que c'est pas grave si j'ai raté dix minutes de visite... que je peux intégrer le groupe sans problème.. Elle veut rien savoir ! Pourquoi que je suis pas étonnée !!!??? Cette rigidité qu'ont les gens qui bossent dans les églises m'exaspère ! Ils sont tous faits du même moule ! 'Faudrait peut-être penser à le casser !!! Qué misère ! Et alors quand je lui demande le pourquoi d'un signe juif dans une abbaye, elle me fait celle qui comprend pas et me tend un livre touristique à 15€ ! Bé voyons ! Hasta luego, ma pas amica du tout !

C'est donc, sans aucune explication sur cette étoile que je fais le tour de cette abbaye qui me reçoit bien mal... Elle est bien belle, dans un style très spécial avec cette muraille presque berbère... J'aurais vraiment aimé la visiter... mais bon ! Comme dit mon collègue Ganeshou... "Quand ça coince, 'faut pas forcer !".

Mais la malchance me poursuit ! Pas de bus en vue et je peux les voir arriver puisque je suis au terminus, tout là-haut dans la montagne ! Je suis au milieu de nulle part, sous un cagnard pas possible, je suis certaine qu'il fait 40°C et j'ai pas d'eau ! Vu que la Madame en Haut a fermé les portes derrière moi, je peux même pas lui demander de remplir ma bouteille vide ! Et zou maï, ça continue !

Au bout de 15 minutes d'attente comme sœur Anne qui ne voit rien venir, je décide de faire la descente à pied ! 

Je peux vous dire que l'Alhambra, je la connais pas cœur ! Je l'ai eu devant les yeux pendant près d'une heure de descente ! Elle est magnifique mais sous le soleil qui cogne, on s'en passerait ! Je me fais quelques petites haltes en me cherchant l'ombre mais je peux vous dire qu'elle est rare !

Et quand j'arrive enfin au Sacromonte du bas, celui des gitans... je suis rouge écrevisse, premier coup de soleil de l'année ! Mais je suis trop contente, les grottes gitanes m'attendent !

J'entends déjà les guitares et ça chante tout là-haut, au musée de la Mujer Gitana prévu dans ma visite. Je vous dis pas comme à présent ça grimpe ! Moi qui voulais ne plus grimper, c'est râpé !

Mais encore une fois... la chance n'est pas avec moi ! Ce coup-ci, à cause de la Cruz de Mayo, le musée est fermé ! Je suis accueillie par tout un moulon de femmes, certainement toutes les Mujeres du Musée de la femme gitane et comme j'ai l'air épuisée, elles me réconfortent d'une sangria et d'une assiette de paella. Je vous dis pas comme la sangria est forte ! Boudie ! Si j'arrive à encore marcher après cette boisson de folie... c'est que je suis forte !

Je passe une petite heure en leur compagnie, je comprends pas grand chose de ce qu'elles me racontent, mon espagnol est bien trop limité mais on passe un superbe moment illuminé de leur étonnement joyeux quand je leur dis connaître El Camaron qui trône encore au milieu de leur bric à brac en dessous de la croix rouge !

"Petite gitane, si tu m'aimais

Je t'achèterais la meilleure grotte de Grenade...

Les gitans sont des amours, 

ils cuisinent pour leurs gitanes

des pois chiche avec des choux..."

Je sais, je sais, les paroles des chansons gitanes sont pas toujours très recherchées mais en Espagnol ça le fait, je peux vous l'assurer ! Bien remise de ma montée, ces braves femmes me conseillent d'aller voir le Musée de Las Cuevas qui se trouve juste au-dessus de leur grotte à elles. Encore quelques marches, quelques longues montées et j'y suis. L'entrée coûte 5 euros, j'ai un peu l'impression que c'est l'attrape-couillons mais d'un autre côté, je me dis que toutes les grottes aujourd'hui sont habitées ou alors transformées en scènes de Flamenco show, donc si je veux voir à quoi ressemblait la vie ici, du temps où elles étaient occupées par les gitans de la Reine Isabelle, c'est ici que j'en aurais le plus l'occasion. 

Et je regrette pas l'affaire, parce que le Musée est très bien fait, on y apprend tout plein de choses et en particulier la légende des grottes...

Quand il a été certain pour les Princes Musulmans que l'Andalus allait tomber aux mains des Chrétiens, beaucoup d'entre eux ont pensé que cela ne serait que temporaire ! Ils ne pouvaient imaginer ne plus jamais revenir à Grenade, leur terre de paradis. Donc, certains de revenir, ils ont grimpé la montagne et enterrer leur fortune en or et argent dans la montagne du Sacromonte. Et ils laissèrent derrière eux beaucoup de leurs esclaves, en particulier, les eunuques noirs, certains de les récupérer eux-aussi, à leur prochain et rapide retour. Mais on sait tous que l'Histoire ne s'est pas déroulée comme ça. Les eunuques n'ont jamais vu le retour de leurs maîtres mais par contre, ils ont tenté pendant des années de trouver l'or et l'argent dans la montagne ! Ils creusèrent tant et tant la roche, qu'à la fin, ils s'installèrent à l'intérieur de leurs trous ! C'est ainsi que sont nées toutes ces belles "cuevas" du Sacromonte. Plus tard, d'autres peuchères s'y installèrent, Los Gitanos venus des Indes lointaines. Elle est pas belle mon histoire, dans la grande Histoire !? J'adore apprendre ce genre de trucs qui ne sert à rien mais qui fait rêver ! 

Las cuevas sont toutes petites, maximum, trois pièces mais c'est très joli et on s'y sent comme dans le ventre de sa mère. C'est réconfortant que c'est rrrien de le dire ! Et alors les peuchères, ils avaient une vue sur l'Alhambra, qu'aujourd'hui, elle vaut cher !

Après cette visite imprévue mais fort sympathique, je m'attarde un peu sous la tonnelle de la buvette, histoire d'hydrater un peu mémère parce qu'il fait vraiment soif aujourd'hui ! Puis j'attaque la descente vers l'Albacin ! Qué beauté ! Je conseille à tout le monde de le faire ! Prendre le bus pour la montée et se régaler des ruelles aux maisons blanches qui s'accrochent à la montagne, en descente. Ici, c'est un mélange de Grèce, de Maroc et d'Espagne ! Le royaume du bleu et du blanc ! Gare aux coups de soleil avec la réverbération !!!

Quand j'arrive enfin à l'Albacin, la musique change et le Flamenco fait place à la Sévillane. Presque toutes les femmes, de tous les âges, mêmes les minotes dans leur poussette sont vêtues de la robe à volants typique d'ici. Quant aux hommes, c'est pareil, tous plus beaux les uns que les autres dans des costumes de fête. La musique bat son plein sur toutes les places, dans toutes les bodégas, chacun a un verre à la main, ça bazarette ou ça mange depuis ce matin mais surtout, ça danse ! Qué beauté ! J'ai fait des kilomètres de film que je vous montrerai à mon retour ! Trop trop beau ! Ce peuple Andalou a une joie de vivre que ça fait trop du bien de passer un peu du temps à leur côté !

Il est déjà cinq heures, je me rends compte que j'ai rien mangé depuis ce matin mais j'ai beau cherché une place assise dans une bodéga, c'est impossible ! Tout Grenade est vraiment dans la rue aujourd'hui !

Alors je fais comme tout le monde, je prends mon assiette et je vais me la manger dehors, sur une placette, un peu à l'ombre et le spectacle peut commencer, tout là-haut au Mirador San Sébastian, là où que la vue sur l'Alhambra, est la plus belle !

C'est tranquillou que je descends jusqu'à la cathédrale, d'une place à l'autre, d'une sévillane à une autre jusqu'au bout de la nuit à la fraîcheur du soir... 

Olé y Viva l'Espana !

Mistouline